Red Hollywood

Cinéaste, critique et enseignant, l’Américain Thom Andersen est l’une des figures majeures du cinéma documentaire contemporain. Explorant la capacité du cinéma à donner corps au réel, ses films interrogent la représentation et les multiples enjeux idéologiques sous-jacents. Marquée par un recours quasi-constant aux images d’archives et aux extraits de films, l’œuvre de Thom Andersen constitue un lieu idéal d’observation du monde. Invité à commenter un ensemble de films, pour certains encore inédits en France, Thom Andersen développe avec Red Hollywood (1995-2013), une relecture attentive des heures sombres de l’histoire du cinéma hollywoodien. Coréalisé avec le cinéaste et théoricien américain Noël Burch, cet essai documentaire s’attache aux trajectoires tragiques de ceux qui furent exclus de l’industrie cinématographique hollywoodienne pour leurs sympathies, avérées ou non, à l’égard de l’idéologique communiste. Si l’histoire de la fameuse Liste Noire d’Hollywood est désormais connue de tous, les noms des victimes de cette grande chasse aux sorcières, et leurs films, sont généralement tombés dans l’oubli. Rassemblant des séquences extraites de plus d’une cinquantaine de long-métrages, des entretiens avec certains des dix d’Hollywood (la liste des Hollywood Ten fut la première liste éditée en 1947 par la commission sur les activités anti-américaines) et quelques images d’archives, Red Hollywood propose de réévaluer l’importance de ces réalisations condamnées au silence et de mesurer les conséquences sur la pensée politique d’une telle mise à l’index.
Séance présentée par Thom Andersen et suivie d’une conversation avec Noël Burch. (en anglais)

« Près d’un demi-siècle s’est écoulé depuis qu’Hollywood entreprit l’épuration de ses communistes et de leurs compagnons de route, mais bien qu’étudiée par trois générations d’historiens, la Liste Noire n’est pas encore passée à l’histoire. Nous savons ce qui s’est passé : si nous sommes trop jeunes pour nous en souvenir, nous pouvons nous renseigner. Et le sens de ces événements, ressassés de manière obsessionnelle, devrait toujours être suffisamment évident : une épuration absurde, néfaste, provoquée par l’hystérie anticommuniste, dont les victimes se trouvaient êtres célèbres et, pour porter certaines, prestigieuses ou fascinantes. Mais savons-nous quel jugement porter sur ces victimes ? Sont-elles des martyrs ? Ou bien n'ont-elles pas dans une certaine mesure attirée sur elles les ennuis ? Avant d’être mis à l’index, c’étaient des privilégiés qui exerçaient un métier « de création », mais étaient-ce pour autant des créateurs ? Et donc devons-nous voir dans la perte de ces individus une perte pour notre culture en général, pour l’art du cinéma en particulier » Thom Andersen, Les communistes de Hollywood, Autre chose que des martyrs, ouvrage co-signé avec Noël Burch, Paris, édition Presses de la Sorbonne Nouvelle, 1994, p.9.

Thom Andersen & Noël Burch, Red Hollywood, 1995-2013, video, nb./coul., son, 114min. (vo. anglais)

Le cycle Thom Andersen est organisé en association avec le Österreichisches Filmmuseum (Vienne) ; et à l’occasion de la parution des écrits de Thom Andersen, Slow Writing (2017), aux éditions The Visible Press.

Remerciements : Thom Andersen, Österreichisches Filmmuseum (Vienne) et Lux (Londres).