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Crucifixion

Vers 1965

Niki de Saint Phalle

Cette femme catholique aristocratique qui avait été élevée dans une famille stricte, attaquait l’église avec des sculptures […] Dans des choix formels parfaitement calibrés, Niki de Saint Phalle a défiguré des articles de foi de longue date – le grand art, la famille, l’église. Cette sculpture marque un moment important dans la carrière de Saint Phalle, car elle préfigure les œuvres célèbres de Nana.* 

Conçue pour être accrochée en hauteur, cette femme crucifiée se présente offerte au spectateur : entre ses bas et ses porte-jarretelles, les jambes largement ouvertes révèlent un pubis velu – un magma sombre de fils de laine. Figure archétypale, à la fois « mère ou putain », ce personnage peut susciter moquerie, révulsion ou fascination. Comme pour La Mariée, sa poitrine est couverte d’objets divers tels que des jouets et des fleurs artificielles mais, à la différence de celle-ci, l’artiste a ici introduit de la couleur.

Toutefois, ses bigoudis ainsi que son accoutrement contribuent à ancrer le personnage dans les années 1960. Niki de Saint Phalle abandonne peu à peu sa vision de la femme soumise victime de la violence du patriarcat. Elle crée alors une figure féminine à la fois puissante et joyeuse. Cette période correspond à une étape décisive dans son œuvre : celle de ses premières Nanas, personnages aux formes rebondies, d’abord construites en papier mâché et en tissu, puis, comme ici, en polyester peint, technique qui permet une polychromie plus éclatante. Par leur anatomie aux formes plantureuses et disproportionnées, les Nanas évoquent quelques statuettes de Vénus de l’époque paléolithique.

 

Cette œuvre a été acquise en 1975, peu avant l’inauguration du Centre Pompidou.


* Eunice Lipton, historienne d'art, dans Hyperallergic, magazine artistique en ligne basé à New York, 26 janvier 2015.