Le devenir de « La Colonne sans fin »
Par Sidney Geist
Constantin Brancusi
Il y a une bonne raison de croire que Brancusi espérait vraiment réaliser une version colossale de La Colonne. Interviewé pendant qu’il préparait sa première exposition à la Brummer Gallery, il affirma, dans un article publié par le New York Times le 3 octobre 1926, douze ans avant de réaliser la variante roumaine : « L’architecture de New York, ses gratte-ciel me donnent l’impression d’un nouvel art poétique grandiose. »
Le plus grand bâtiment de New York était à l’époque le Woolworth Building, haut de 241 mètres. Le jour où cette phrase fut publiée dans le Times, une autre déclaration de Brancusi paraissait dans le New York World : « J’aimerais installer une Colonne dans Central Park. Elle serait plus grande que toute autre construction, trois fois plus grande que votre obélisque de Washington, avec une base d’une largeur correspondante (60 mètres ou plus). Elle serait en métal. Dans chaque pyramide, il y aurait des appartements, où les gens pourraient vivre, et, tout en haut, je mettrais mon oiseau en équilibre sur le faîte de ma Colonne infinie. »
Vers la fin de sa vie, Brancusi s’engagea effectivement dans un projet d’installation d’une Colonne gigantesque. La proposition lui en avait été faite par Barnet Hodes, juriste et collectionneur d’art de Chicago […] Dans une lettre du 9 décembre, Brancusi écrivit à Hodes qu’il avait commencé « l’étude pour La Colonne sans fin que [il imaginait] haute de 400 mètres. Si elle pouvait être réalisée en acier oxydable POLI [traduction erronée pour « inoxydable »], elle serait une des merveilles du monde. »
Après un mauvais hiver, le 16 mars 1957, Brancusi mourut.
In La Colonne sans fin, Carnets de l’Atelier Brancusi - La série et l’œuvre unique, Paris, Éditions Centre Pompidou, 1998, p. 26-27.
Première parution dans Museum Studies, volume 16, 1er novembre 1990, Art Institute of Chicago.