Projection and discussion
L'âge animé
Deux programmes d'animation, en collaboration avec la revue Blink Blank
26 Jan 2022
The event is over
Certes, contrairement au cinéma qui, fiction ou documentaire, procède d’un enregistrement continu et pour lequel, comme le disait André Bazin, « l’image des choses est aussi celle de leur durée », les personnages animés ne vieillissent pas en même temps que nous à chaque plan qui défile devant nos yeux.
Pour le reste, relevant par excellence du cinéma, l’animation demeure un art du temps, qui regarde le monde, nous regarde, questionne les rapports entre générations, les gestes de transmissions, le poids des ans, la relégation des anciens dans les marges d’une société active, les souvenirs que nous conservons d’eux une fois qu’ils ont disparu. Fiction ou documentaire, rien ne lui est étranger, d’autant moins qu’une bonne part de sa production s’adresse dorénavant à un public adulte. Simplement, il s’exprime avec les outils qui sont les siens. Il fait parler des animaux, met en scène des créatures mi-humaines, mi-bêtes, joue avec la dimension morale des contes et l’éloquence de la fable.
La matière même des films a souvent partie liée avec ce qu’ils nous disent. Un homme qui raconte sa vie, le corps troué, littéralement en lambeaux (Ryan de Chris Landreth), les pensionnaires d’un ehpad croqués sur le vif (Écorce, de Samuel Patthey et Sylvain Monney), c’est en effet à travers la texture du numérique ou celle des pages d’un carnet de dessin que s’incarnent la déchéance des corps, les ravages du temps, l’éphémère des existences.
Dans Père et fille (Michael Dudok de Wit), quelques traits font exister un paysage de polder et une femme que l’on voit vieillir à chaque fois qu’elle revient sur les lieux, hantés par un souvenir d’enfance. Cet univers gracieux et minimaliste suffit pour, sans un mot, faire sourdre en nous une méditation mélancolique, indéfinie et universelle sur nos existences. Cette satisfaction esthétique particulière, au-delà de la sensibilité et de l’intelligence, Dudok de Wit, dans le premier numéro de Blink Blank, proposait de l’appeler l’« atemporel ».
Jacques Kermabon, rédacteur en chef de la revue Blink Blank
Projections
Programme 1 - Mercredi 26 janvier, 16h, Cinéma 2
Accessible pour le jeune public, dès 5 ans
Édouard Nazarov, Il était une fois un chien, Russie, 1982, 10 min
Un vieux chien de garde est mis à la porte par ses maîtres. Errant dans la forêt, il va retrouver son vieil ennemi, le loup… L’histoire est tirée d’un conte populaire ukrainien.
Anne Huynh, Mon papi s’est caché, France, 2018, 7 min
Un grand-père explique à son petit-fils qu’il devra prendre grand soin de son jardin après sa mort. S’ensuit une discussion, touchante et poétique, sur les traces qui restent après la disparition d’un être cher…
Garri Bardine, Le Loup gris et le Petit Chaperon rouge, Russie, 1990, 26 min
La patte du maître de l’animation russe est ici au service d’une libre adaptation musicale en pâte à modeler du conte de Charles Perrault.
Michaël Dudok De Wit, Père et Fille, Pays-Bas, 2000, 9 min
Un père dit au revoir à sa fille et s’en va. Elle attend son retour des jours, des saisons, des années…
Michel Ocelot, Le Manteau de la vieille dame, France, 1989, 10 min
Dans le Japon de Hokusai, la nuit, une aimable vieille dame rentre chez elle. Un malfaiteur la suit pour lui voler son manteau.
Jan Pikava, Le Joueur d'échec, États-Unis, 1997, 5 min
Geri se lance dans une partie d'échecs. Il apparaît comme un gentil vieillard, mais en changeant de côté pour jouer avec les pions noirs, il devient son propre alter ego, plus rapide et plus jeune...
Magda Guidi et Mara Cerri, Sogni Al Campo, France, Italie, 2020, 10 min
Un garçon cherche son chat le long d'une rivière. Il ne le trouvera pas. Celui-ci va mourir, et s'est éloigné de tout pour trouver l'intimité. L'enfant arrive aux portes du temps, là où les morts disparaissent, et les vivants les laissent partir. L'enfant a peur, il pénètre dans une forêt de symboles et de souvenirs. Il grandit. Ses illusions d'enfants se dissolvent et se mêlent au paysage.
Natalia Chernysheva, Toile d'araignée, France, 2017, 4 min
Alors qu’une mamie tricote tranquillement dans son fauteuil, une araignée curieuse vient se poser sur son épaule. D’abord effrayée, la dame tente d’aspirer la pauvre bête, mais pourquoi la maltraiter alors qu’elles pourraient partager leur passion du crochet ? La rencontre va prendre une tournure inattendue.
Programme 2 - Mercredi 26 janvier, 20h, Cinéma 2
Tout public
La séance est suivie d’une rencontre virtuelle avec Samuel Patthey, animée par Jacques Kermabon.
Sarah van den Boom, Raymonde ou l’évasion verticale, France, 2018, 16 min
Le potager, les petits pois, les pucerons et les culottes sales, Raymonde en a vraiment assez. Tout compte fait, elle préfèrerait le sexe, puis l'amour, puis l'immensité du ciel...
Lucrèce Andreae, Pépé le morse, France, 2017, 14 min
Sur la plage sombre et venteuse, Mémé prie, Maman hurle, les frangines s'en foutent, Lucas est seul. Pépé était bizarre comme type, maintenant il est mort.
Janice Nadeau, Mamie, Canada, 2016, 6 min
Mamie habite en Gaspésie dans une maison faisant dos à la mer. Sa petite-fille se questionne : « Pourquoi Mamie ne s’intéresse-t-elle ni à moi, ni à ses autres petits-enfants ? Pourquoi ne partage-t-elle pas avec moi son affection et sa belle couverture ? Que s’est-il passé pour rendre Mamie si indifférente ? » À l’image de sa demeure, Mamie se renferme et ne laisse entrer quiconque dans son cœur.
Chris Landreth, Ryan, Canada, 2004, 13 min
Ce film s'inspire de la vie de Ryan Larkin, un animateur canadien qui, il y a trente ans, a réalisé à l'Office national du film certaines des œuvres d'animation les plus marquantes de son époque. Ryan fait entendre la voix de ce dernier et celles de gens qui l'ont connu par l'entremise d'étranges personnages en 3D, tordus, brisés et désarticulés...
Christopher Hinton, Flux, Canada, 2002, 7 min
Sur fond de nuages noirs, la vie d’une petite famille en accéléré. Des crises, des instants de tendresse, divers incidents ponctuent son quotidien. Le temps passe, et comme la mémoire humaine, le film retient surtout les moments beaux et importants…
Regina Pessoa, Oncle Thomas - La comptabilité de jours, Portugal-Canada-France, 2019, 13 min
Ce film est une déclaration d'amour à cet oncle un peu excentrique qui inspira artistiquement la réalisatrice, jouant un rôle déterminant dans sa carrière de cinéaste. Un hommage tendre et émouvant à ce poète du quotidien.
Chen Chen, Vieil ours, France, 2016, 11 min
Une jeune femme partage sa vie dans son appartement en ville avec un vieil ours dont elle prend soin comme d’une personne âgée. Tous les jours, elle lui fait la cuisine et lui donne le bain. Mais avec l’âge, le plantigrade perd un peu la tête et son désir de forêt devient entêtant. La jeune femme doit se rendre à l’évidence : impossible de continuer ainsi.
Théodore Ushev, Vaysha l’aveugle, Canada, 2016, 8 min
Vaysha n’est pas une jeune fille comme les autres, elle est née avec un œil vert et l’autre marron. Ses yeux vairons ne sont pas l’unique caractéristique de son regard. Elle ne voit que le passé de l’œil gauche et le futur de l’œil droit. Véritable sortilège, sa vision scindée l’empêche de vivre au présent.
Samuel Patthey et Sylvain Monney, Écorce, Suisse, 2020, 15 min
Une matière craquelée, ressemblant à de l’écorce. Le temps semble s’être arrêté autour de la villa, quand soudain une silhouette passe. À l’intérieur, on découvre des corps affaiblis, des aides-soignants et un chat noir. Entre un épisode des Feux de l’amour et un yaourt, on regarde le temps s’écouler, répétitivement.
Tex Avery, The Little Red Riding Hood, États-Unis, 1943, 4 min
Lassés de toujours jouer les mêmes rôles, le Petit Chaperon rouge, sa grand-mère et le Loup demandent une nouvelle version du conte. Dans celle-ci, le Petit Chaperon rouge devient une pin-up travaillant dans un cabaret.
When
4pm - 6pm
8pm - 10pm
Where
Anne Huynh, Mon papi s’est caché, 2018
© D.R.